La leçon d’anatomie

La leçon d'anatomie Rembrandt   La leçon d’anatomie  Rembrandt 1632

Lorsque j’ai eu six ans, mes parents ont jugé adéquat de m’emmener chez le dentiste.

Contrôle de routine, on disait.

Sauf que…sauf qu’à l’époque, les adultes devaient être moins regardants et on buvait notre eau, noyée dans la grenadine. Et l’homme trouva sur ma dentition, encore de lait, de quoi l’occuper quelques années.

Personne n’aime aller chez le dentiste, et moi, qui ai vécu, le frôlement du nerf par une fraise sans anesthésie, et l’arrachage de molaire sous glaçon, moins que personne.

Ce dentiste là, avait de surcroît, réuni les conditions de flippage idéal. Cabinet à l’étage, appartement bourgeois, moulures et murs blancs. M. , son assistante, venait nous ouvrir. Je me suis toujours demandé, du haut de mes années d’enfance, comment une créature aussi jeune et jolie, pouvait avoir un job aussi sinistre. Je n’ai jamais osé lui demander.

Puis, elle nous conduisait immuablement au sein de la salle d’attente. Comme si après le 692ème rendez vous, on pouvait avoir oublié l’itinéraire. Encore que…l’appartement étant en L, on n’y voyait pas plus loin que le coin…

Pour agrémenter notre itinéraire, foultitude de petits cadres où n’en finissaient pas de mourir , des papillons épinglés. La cruauté, faite praticien, cet homme-là.

Le linoléum grinçait abominablement. Une fois enfermés dans la salle d’attente, impossible de ne pas entendre M. revenir nous chercher, pour nous conduire dans la salle de toutes les tortures.

Certainement pour faire oublier ce bruit crispant, l’attente était agrémentée d’une sonorisation en boucle de morceaux de musique classique. Moi j’ai vite appris à hurler plus fort que la musique ! Et même encore maintenant, surprise par une bribe de ce genre musical, mon cerveau promet instantanément, que ok, ok, les carambars, j’arrête, promis, juré !

Mais ce qui a immédiatement fasciné mes six ans, aura été , une reproduction de La leçon d’anatomie. Lui disputait, l’attention des patients, une classique mâchoire écorchée, classique parmi les classiques des cabinets dentaires. Je ne savais rien de Rembrandt, mais je m’asseyais toujours de manière à pouvoir éprouver cette image. A six ans, j’ai sombré dans la béatitude pour la peinture hollandaise du 17ème siècle. Je n’en suis toujours pas repue…

Personne ne s’en est vraiment soucié. Pas facile, pour échanger, l’art flamand, dans la cour de récré du CP !

Qu’importe !

Quelque chose d’intrigant venait d’entrer dans ma vie et n’en sortirait plus. Une curiosité absolue pour la peinture de genre qui ne m’a jamais quittée.

Belle semaine, les Oursins !

A vendredi,

Oursine

 

 

 

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Publié dans Histoires, Peintures, Saison après saison

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